Lamarckisme - Darwinisme

Lamarck, Philosophie zoologique, 1809

LamarckComment la girafe a-t-elle acquis un long cou

On sait que cet animal, le plus grand des mammifères, habite l'intérieur de l'Afrique, et qu'il vit dans des lieux où la terre, presque toujours aride et sans herbage, l'oblige de brouter le feuillage des arbres, et de s'efforcer continuellement d'y atteindre. Il est résulté de cette habitude, soutenue, depuis long-temps, dans tous les individus de sa race, que ses jambes de devant sont devenues plus longues que celles de derrière, et que son col s'est tellement allongé, que la giraffe, sans se dresser sur les jambes de derrière, élève sa tête et atteint à six mètres de hauteur.

Comment les serpents ont-ils perdu leurs pattes

Les serpens ayant pris l'habitude de ramper sur la terre, et de se cacher sous les herbes, leur corps, par suite d'efforts toujours répétés pour s'allonger, afin de passer dans des espaces étroits, a acquis une longueur considérable et nullement proportionnée à sa grosseur. Or, des pattes eussent été très inutiles à ces animaux, et conséquemment sans emploi : car des pattes allongées eussent été nuisibles à leur besoin de ramper, et des pattes très-courtes, ne pouvant être qu'au nombre de quatre, eussent été incapables de mouvoir leur corps. Ainsi le défaut d'emploi de ces parties ayant été constant dans les races de ces animaux, a fait disparoître totalement ces mêmes parties, quoiqu'elles fussent réellement dans le plan d'organisation des animaux de leur classe.

Darwin, Origine des espèces, 1859

darwinLa lutte pour l'existence (chap.III). Grâce à cette lutte, les variations, quelque faibles qu'elles soient et de quelque cause qu'elles proviennent, tendent à préserver les individus d'une espèce et se transmettent ordinairement à leur descendance, pourvu qu'elles soient utiles à ces individus dans leurs rapports infiniment complexes avec les autres êtres organisés et avec les conditions physiques de la vie. Les descendants auront, eux aussi, en vertu de ce fait, une plus grande chance de persister ; car, sur les individus d'une espèce quelconque nés périodiquement, un bien petit nombre peut survivre. J'ai donné à ce principe, en vertu duquel une variation si insignifiante qu'elle soit se conserve et se perpétue, si elle est utile, le nom de sélection naturelle, pour indiquer les rapports de cette sélection avec celle que l'homme peut accomplir. Mais l'expression qu'emploie souvent M. Herbert Spencer : « la persistance du plus apte », est plus exacte et quelquefois tout aussi commode. Nous avons vu que, grâce à la sélection, l'homme peut certainement obtenir de grands résultats et adapter les êtres organisés à ses besoins, en accumulant les variations légères, mais utiles, qui lui sont fournies par la nature. Mais la sélection naturelle, comme nous le verrons plus tard, est une puissance toujours prête à l'action ; puissance aussi supérieure aux faibles efforts de l'homme que les ouvrages de la nature sont supérieurs à ceux de l'art.