Les noms des animaux

De tous temps les hommes ont nommé les animaux. Et bien sûr, ils n’ont pas attendu les tests ADN pour savoir si les écureuils roux et gris étaient ou non de la même espèce. La ressemblance a été le premier critère. Les premiers élevages ont permis de savoir que les chèvres et les moutons ne s’accouplaient pas. On les mit dans des groupes différents. On s’est autorisé à désigner les animaux avant l’apparition des premiers zoologistes. La façon de nommer les animaux crée parfois des difficultés, des confusions et des pièges auprès des élèves.

Mâles et femelles

concrètement, on a attribué le même nom à tous les animaux qui se ressemblaient. On dit, depuis Linné, qu’ils sont de la même espèce. Un nom par espèce : Il y a “l’espèce chien”, “l’espèce chat”. Pas de problème en apparence. Précisons que chaque espèce comprend des individus mâles et d’autres femelles. Cela tombe bien puisque l’on dit chat et chatte, chien et chienne... Toutefois, une complication se présente avec le lièvre et la hase, le porc et la truie, le taureau et la vache. Deux mots différents pour la même espèce : dois-je dire “espèce taureau” ou “espèce vache”. On opterait facilement pour la seconde, car dans les champs on voit plus de vaches que de taureaux; On a tendance à élever peu de taureaux à cause de leur capacité à féconder plusieurs vaches. Quoi qu’il en soit, il y a un mot du genre masculin pour les mâles et autre du genre féminin pour les femelles ; c’est logique.

C’est là que les enfants acquiescent en confirmant qu’il y a le crapaud et la grenouille, le hibou et le chouette, le goéland et la mouette, le corbeau et la corneille, le pou et la puce, le criquet et la sauterelle. Les écrits imaginaires de la littérature autorisent ces accouplements contre nature. Mais hélas, mettre en contact un crapaud et une grenouille est toujours un échec. Ce sont des espèces différentes. Mais alors, qui est la femelle du crapaud et qui est le mâle de la grenouille ? On comprend vite qu’il y a des crapauds femelles malgré le genre masculin. On a un peu de mal à accoupler une mouche avec un moustique, car ils ne ressemblent pas et n’ont pas les mêmes comportements. Il ne faut donc pas confondre genre et identité sexuelle. Il y a “confusion des genres” ! Ainsi en est-il des mannequins et des top-modèles qui sont du genre masculin, mais le plus souvent de sexe féminin.

Devant la difficulté à reconnaître le sexe des insectes, on n’a pas pensé à utiliser des termes spécifiques au mâle et la femelle. Ainsi en est-il de l’abeille, du bourdon, du frelon, de la guêpe... où les genres masculin - féminin semblent avoir été attribués au hasard. Cependant la finesse du corps des agrions semble lui avoir attribué le sexe féminin, aussi les nomme-t-on “demoiselle”. Inversement, le corps trapu du bourdon est considéré comme mâle. Quelqu’un a eu la mauvaise idée d’appeler “faux-bourdon” le mâle de l’abeille, entretenant ainsi la confusion avec les bourdons. Nous le voyons, les genres masculin et féminin ne correspondent à aucune réalité zoologique.

Dromadaire

Espèces d’un certain genre

Pour nommer et cerner un groupe zoologique, la ressemblance est un critère plus subjectif que celui du croisement reproductif. Le renard et le chien se ressemblent, mais ne s’accouplent pas, ce sont des espèces différentes. Cependant, petit à petit, les humains ont pressenti que le renard, le loup et le chien étaient proches-parents. D’où l’idée de créer des regroupements d’espèces qu’on appelle genres. Tiens ! “genre”, le genre du professeur de français n’est celui du professeur de SVT : polysémie. Et je ne parle pas de ce type d’un “genre” bizarre !

Généralement, pour les mammifères, la langue française courante a, plus ou moins, un mot par espèce ou par genre. La situation est différente pour les petits animaux : nous disons le moustique, la mouche, le carabe, la limace... sans se douter que chaque mot recouvre des dizaines, voire des centaines d’espèces. il en est de même du lombric ou ver de terre.

Le vocable “ver” est un grand fourre-tout. Il peut être ... blanc, ... gris, ... luisant, ... de farine, ... à soie, ... de vase, ... de terre, ... Quand vous dites “ver” à un biologiste, il se demande si vous faites allusion à un insecte coléoptère, un insecte diptère, un insecte papillon ou encore à un annélide... Le “ver” de l’opinion, c’est cette chose horrible plus ou moins molle, plus ou moins longue et qui gigote, un vermisseau quoi !.

Inversement, des mots différents sont attribués à la même espèce. Ainsi un papillon est d’abord chenille, puis chrysalide avant de devenir adulte. Une mouche est d’abord asticot, puis pupe avant d’être qualifiée de mouche (adulte). Quand l’homme de la rue voit une chenille, il ne vous dira pas : “tiens, voilà un papillon”, Voyant un asticot dans un aliment avarié, il ne vous dira pas : “tiens, quelle vilaine mouche”. Les humains ont été incités à utiliser des termes différents du fait de la dissemblance entre les stades, ce qui est caractéristique des animaux à développement indirect. cependant, malgré la ressemblance entre les parents et leurs enfants, nous distinguons le sanglier, de la laie et de leurs marcassins. le faon est le fruit de l’union de la biche et du cerf.
De plus, on aime les synonymes : l’orque c’est l’épaulard, les dauphins sont aussi appelés marsouins, le rat brun est appelé surmulot. Quelle richesse de vocabulaire ! de quoi donner de l’imagination au maître qui veut interroger les élèves ou à l’organisateur de jeux radiophoniques ou télévisuels très prompt à attribuer des prix aux vainqueurs.

L’enseignement de la zoologie, tout comme celle de la langue française fait apparaître des confusions binaires : et-est, a-à, ou-où etc... en français et chameau-dromadaire en mammalogie, pingouin-manchot en ornithologie, vipère-couleuvre en herpétologie, grillon-criquet en entomologie.

L’homme de la rue utilise parfois des expressions imagées pour désigner les animaux. Il y a le pisse-vinaigre ou lièvre de mer, la bergeronnette ou hochequeue ou encore lavandière, le moineau ou piaf, l’araignée de mer, le hérisson de mer, le cheval de mer, l’éléphant et le lion de mer... (Signalons au passage que les êtres terrestres que sont les humains ont tendance à nommer les animaux marins par comparaison avec des animaux terrestres plus connus). Aussi Linné a-t-il voulu standardiser tout cela : il a choisi le latin qui présente l’énorme avantage d’être une langue morte ; de cette façon, il était sûr qu’il n’y aurait pas d’interférence avec le langage courant. Désormais, chaque espèce aura un nom de genre et un nom d’espèce en latin. Ainsi le chien sera appelé “Canis canis” et le loup “Canis lupus”. Comme cela on sait qu’ils sont du même genre mais pas de la même espèce.

La classification des animaux

Récemment, les scientifiques ont revu toute la classification du vivant en intégrant l’apport des connaissances sur l’évolution et sur la génétique moléculaire, obligeant les enseignants à renommer les grands groupes zoologiques. Ainsi, les reptiles n’existent plus, groupe, au demeurant très mal nommé puisqu’il réunissait toutes sortes d’animaux qui tous ne rampent pas comme le voudrait l’étymologie : les tortues, les dinosaures... L’enseignant se trouverait donc confronté au choix entre un vocabulaire accessible mais obsolète et un vocabulaire trop pointu mais accepté par la communauté scientifique. Heureusement, il existe une solution qui évite ce choix impossible...

Pour conclure, le choix du registre de vocabulaire se pose à l’école. Je propose aux enfants de la Maternelle et à l’homme de la rue de continuer à parler des reptiles, mais ponctuellement de remplacer certaines dénominations trompeuses comme par exemple “araignée d’eau” par un mot accessible, ici le gerris, ce qui permettra de savoir que le gerris n’est pas une araignée.
une dernière question se pose : pourquoi connaître le nom des animaux ? Eh ! maîtresse, ça te sert à quoi de savoir que cette punaise noire et rouge s’appelle un cercope ?

Quiz :
Qu’y a-t-il de commun entre Roquefort, gigot, laine ?
Qu’y a-t-il de commun entre le kiwi, le phragmite, l’anémone, l’onagre?

Le renard devrait s'appeler Goupil (vulpes en latin). Son nom français actuel vient de celui d'un personnage du roman de Renart. Je ne sais pourquoi le "d" a remplacé le "t".

Le coin du programmeur