Plaidoyer pour le bocage et... le poêle à bois :
Dans les années 1960-1970, l'idée moderne était le remembrement : il fallait agrandir les parcelles pour permettre le passage des machines agricoles, de plus en plus grosses. On a eu du mal à convaincre les paysans. Mais, ultérieurement, trop bien convaincus, ils n'ont plus voulu faire machine-arrière.
Ceci eut des conséquences sur la force des vents, sur l'érosion des sols et sur... la biodiversité : en effet, le bocage est une forêt linéaire ou encore alvéolaire. Le bocage prolonge ce que l'on appelle l'effet lisière (il y a plus de biodiversité à la limite des écosystèmes qu'au milieu).
La destruction du bocage a aussi un impact sur l'effet de serre : les paysans, devenus agriculteurs et chefs d'exploitation, ont bouché leur cheminée et troqué le foyer contre un poêle à fuel. Aberrant ! On le sait, le fuel est une énergie fossile qui ajoute du carbone dans l'atmosphère, contrairement au bois qui ne remet dans l'atmosphère que ce qu'il avait prélevé lors de sa croissance. C'est une énergie renouvelable à l'échelle d'une vie humaine ; puisqu'il faut moins d'un siècle pour transformer une graine en bois de chauffe et seulement une décennie pour récolter le bois d'une cépée fraichement tondue.
"Revenons donc à la cheminée", me direz-vous ! Disons que c'est moins bête que de faire un brasier dans le champ. Mais, il y a bien mieux. Notre traditionnelle cheminée a un très faible rendement énergétique : elle ne restitue dans la maison que 10 à 15 % de l'énergie contenue dans le bois. Un poêle à bois moderne avec double combustion a lui un rendement pouvant atteindre 80%. C'est LA meilleure façon de se chauffer, surtout en milieu rural. C'est mieux que la pompe à chaleur qui fonctionne à l'électricité... nucléaire, c'est mieux que les panneaux solaires photovoltaïques (haute technologie coûteuse en énergie et dont on ne connaît pas la durée de vie...).
On me dira que le faible rendement d'une antique cheminée n'est pas très gênant, dans la mesure où le bois est renouvelable. C'est oublier que le prélèvement de bois ne doit pas dépasser sa croissance ; c'est oublier que le stère de bois a un coût ; c'est oublier aussi qu'une trop grande rationalisation de la sylviculture réduit la biodiversité de la forêt. Au XIXe S. les forges, les fours de boulangerie, la métallurgie ont sur-exploité les forêts.
L'utilsation énergétique du bois n'est en rien un retour ringard aux traditions, n'est en rien un refus de la modernité. La modernité authentique d'aujourd'hui, c'est le poêle à bois à double combustion : on ne fait pas mieux ; c'est aussi la reconstruction du bocage, bêtement détruit par nos parents. Le bocage est le meilleur compromis entre l'Homme et la Nature.
Le choix énergétique de l'électricité a quelque chose de finalement pervers : il donne l'illusion de l'énergie propre puisque les émanations se font loin des villes, contrairement à la cheminée et au pot d'échappement ; il n'incite pas au reboisement, ni à la restauration du bocage.
Se chauffer au fuel, c'est favoriser l'effet de serre. Se chauffer avec une pompe à chaleur, c'est favoriser l'industrie du nucléaire. Se chauffer avec un poêle à bois, c'est favoriser la replantation du bocage, odieusement détruit par certains agriculteurs du siècle dernier.
Bibliographie : Parcs naturels régionaux de France, n°35, février 1999, p.9 : "En 50 ans, 150 000 km de talus ont été détruits en Bretagne... Associations et Parc Naturel... se sont engagés dans la préservation et la reconstruction de ces talus... C'est ce que le Directeur-adjoint du Parc appelle Joindre l'utile à l'agréable."